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d’une singulière abondance au long de cette côte occidentale, surtout près du cap Blanc et de la baie d’Arguin. Il s’en trouve qui pèsent jusqu’à deux cents livres. La chair en est blanche, tendre, grasse, ferme, et se détache en flocons. La peau est grise, épaisse, grasse, couverte de petites écailles. C’est un poisson fort vorace, et que son avidité fait prendre aisément. Comme il a beaucoup de force, il fait des mouvemens prodigieux pour s’échapper.

De tous les animaux qui nagent, il n’y en a point d’une espèce plus surprenante que la torpille (numbfish en anglais), poisson qui a la vertu d’engourdir. Kolbe, qui lui donne le nom de crampe, vérifia par sa propre expérience ce qu’on lit dans plusieurs auteurs, qu’en touchant la torpille avec le pied ou la main, ou seulement avec un bâton, le membre qui prend cette espèce de communication avec l’animal s’engourdit tellement, qu’il devient immobile, et qu’en même temps on ressent quelque douleur dans toutes les autres parties du corps. En un mot, Kolbe éprouva une espèce dé convulsion ; mais, après une ou deux minutes, l’engourdissement diminue par degrés.

Lorsque ce poisson est pris nouvellement, il agit plus souvent et d’une manière plus sensible ; mais, après avoir été quelques heures hors de l’eau, sa vertu languit et diminue par degrés. Kæmpfer croit avoir remarqué qu’elle est plus violente dans la femelle que dans le mâle. On ne peut toucher la torpille femelle