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la conclusion ordinaire était de le renvoyer sur-le-champ, ou de le tuer, pour ôter aux blancs la pensée de suivre son exemple.

La fermeté de Compagnon servait souvent à le tirer des plus dangereux embarras. Étant à Tarako, il envoya un de ses guides à Silabali pour lui apporter du ghingan ou de la terre dorée, et pour inviter le peuple à lui vendre ses cassots, qu’il promettait de payer libéralement. Son messager fut mal reçu. Non-seulement on rejeta ses demandes, mais il fut chassé brutalement, avec ordre de dire au farim de Tarako qu’il fallait être fou pour ouvrir l’entrée de ses terres à un blanc dont l’unique intention était de voler le pays après y avoir fait ses observations. Cette réponse fut rendue à Compagnon en présence du farim ; mais, sans se déconcerter, il répliqua que le farim de Silabali devait être lui-même un fou, pour s’effrayer de l’arrivée d’un blanc dans son pays, et pour refuser quelques morceaux d’une terre dont il avait beaucoup plus qu’il n’en pouvait jamais employer. Après ce discours, il paya le Nègre avec autant de libéralité que s’il eût réussi dans sa commission.

Cette humeur généreuse, fit tant d’impression sur les habitans du pays, qu’elle devint le sujet de tous les entretiens. Un autre Nègre offrit à Compagnon de lui aller chercher de la terre pendant la nuit ; mais, comme la politique du facteur français le portait toujours à cacher ses vues, il reçut cette offre avec beau-