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dissiper un projet de conquête pour lequel il n’attendait plus que le consentement de la cour. À la première nouvelle du changement des fermiers royaux, il passa en France, dans la seule vue d’y faire goûter ses desseins. Comme il n’était question, pour les assurer, que de se rendre maître de Saint-Domingue, il comptait pouvoir prendre cette capitale avec ses seules forces, pourvu qu’il fût secondé d’une escadre qui bloquât le port. Suivant un autre plan qu’il avait dressé pour l’administration de la colonie, il promettait d’y entretenir trois garnisons, de payer les appointemens du gouverneur et de faire entrer tous les ans dans les coffres du roi 40,000 livres de pur bénéfice, sans que sa majesté fît la moindre avance. Mais étant arrivé à Paris avec une lienterie invétérée, dont ses dernières fatigues avaient augmenté le danger, il y mourut vers la fin de 1676, sans s’être trouvé en état de voir le roi ni le ministre. La compagnie des Indes occidentales lui était redevable de plusieurs grosses sommes, dont on assure qu’il n’est jamais rien revenu à ses héritiers ; et toute la France fut surprise de voir mourir assez pauvre un homme à qui les occasions n’avaient pas manqué pour amasser légitimement de grandes richesses. Mais il mourut avec une réputation d’autant plus distinguée, qu’ayant toujours été malheureux dans ses entreprises, il n’y avait rien eu dans sa conduite dont on pût faire honneur à la fortune.