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des hommes que des marchandises ; mais sa famille mit tout en usage pour l’arrêter, et lui refusa tous les secours sans lesquels il ne pouvait former une nouvelle entreprise. Son chagrin répondit à son courage, que ses pertes n’avaient fait qu’irriter. Enfin sa sœur, dont il était tendrement aimé, lui donna dix mille livres, et des lettres de crédit pour une plus grosse somme, sur divers marchands de Nantes. Il leva aussitôt des engagés dont il chargea son navire, et, s’étant hâté de passer à Saint-Domingue, il commença au Port-Margot une plantation, dont il laissa la conduite à des agens sûrs. Ensuite il se transporta au petit Goave et à Léogane, où quelques habitans s’étaient établis depuis peu, après en avoir chassé les Espagnols. Sur sa seule réputation, ces deux postes ne tardèrent point à se peupler : il avait déjà celle d’être le protecteur des misérables. Une autre entreprise qu’il forma immédiatement eut moins de succès. Malgré la disgrâce qu’il avait essuyée à la Jamaïque, il avait conçu de l’inclination pour les Anglais, et ce goût, soutenu par des conseils qu’il respectait, lui fit prendre la résolution de fonder une habitation dans cette île. Il y donna tous ses soins ; mais, loin d’en tirer le moindre avantage, il y perdit encore huit ou dix mille livres. Telle était à peu près sa situation lorsque la compagnie des Indes occidentales jeta les yeux sur lui pour l’administration de toute la colonie française, et le fit agréer à la cour,