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boucaniers, et tantôt sur mer, avec les flibustiers. Il en a remporté le surnom d’Exterminateur. Mais on ajoute que jamais il ne tua un homme désarmé, et qu’on n’eut point à lui reprocher ces brigandages et ces dissolutions qui ont rendu la plupart des aventuriers détestables devant Dieu et devant les hommes.

Achevons la peinture de cette étrange espèce de guerriers, et renvoyons nos lecteurs à l’histoire pour le détail de leurs exploits. Ils étaient si serrés dans leurs barques, surtout ceux des premiers temps, qu’à peine leur restait-il place pour s’y coucher. Nuit et jour ils y étaient exposés à toutes les injures de l’air ; et l’indépendance dont ils faisaient profession les rendant ennemis de toute contrainte, les uns ne laissaient pas de chanter quand les autres pensaient à dormir. La crainte de manquer de vivres n’était jamais une raison pour les ménager : aussi se voyaient-ils souvent réduits aux dernières extrémités de la soif et de la faim. Mais on peut juger que, menant une vie pénible, ils ne trouvaient rien de difficile pour se mettre au large. La vue d’un navire plus grand et plus commode échauffait leur sang jusqu’au transport. La faim leur ôtait la vue du péril lorsqu’il était question de se procurer des vivres. Ils attaquaient sans délibérer. Leur méthode était toujours d’aller droit à l’abordage. Souvent une seule bordée aurait pu suffire pour les couler à fond ; mais leurs petits bâtimens se maniaient sans peine, et jamais