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court trajet, parce qu’il parut plus commode aux vaisseaux français et hollandais d’aller charger à Bayaha, où il se forma insensiblement une nombreuse bourgade.

Aussitôt que les boucaniers se furent fixés, ceux d’un même boucan se rendaient le matin à l’endroit le plus élevé de la petite île pour observer les Espagnols ; et, convenant du lieu où ils devaient se rassembler le soir, ils passaient dans la grande île, d’où ils revenaient à l’heure marquée. Si quelqu’un ne paraissait point, on concluait qu’il avait été pris ou tué, et les chasses étaient suspendues jusqu’à ce qu’il fût retrouvé, ou que sa mort eût été vengée. Un jour les boucaniers de Bayaha se trouvant quatre hommes de moins, prirent sur-le-champ la résolution de se réunir tous le jour suivant. Ils marchèrent vers San-Iago ; et dans leur route ils firent quelques prisonniers, dont ils apprirent que leurs compagnons avaient été massacrés par des Espagnols qui leur avaient refusé quartier. Ce récit les fit entrer en fureur, et ceux dont ils le tenaient furent leurs premières victimes. Ensuite, se répandant comme des bêtes féroces dans les premières habitations, ils y sacrifièrent à leur vengeance tout ce qu’ils purent trouver d’Espagnols.

Les troupes d’Espagne avaient quelquefois aussi leur revanche ; mais ces petits avantages ne décidaient de rien. Enfin les Espagnols s’avisèrent de faire eux-mêmes des chasses générales dans l’île, et la dépeuplèrent presque