Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 17.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

déserte ; mais, sous le règne des flibustiers, on y a compté jusqu’à cinq cantons fort peuplés : la Basse-Terre, Cayouc, le Milplantage, le Ringot, et la Pointe-au-Maçon. Le seul défaut d’eau douce avait empêché qu’on n’en habitât un sixième, nommé le Cabesterre. Tous les fruits communs aux Antilles croissent dans les bons quartiers de la Tortue ; le tabac y est excellent, et les cannes à sucre d’une grosseur et d’une bonté singulières. On y avait transporté de Saint-Domingue des porcs et de la volaille, qui y avaient extrêmement multiplié. Les côtes, surtout celle du sud, sont fort poissonneuses. Lorsque les flibustiers avaient pensé à se saisir de la rade, ils y avaient trouvé vingt-cinq Espagnols, qui s’étaient retirés à la première sommation.

Lorsqu’on eut appris à Saint-Christophe ce qui se passait sur la côte de Saint-Domingue, plusieurs habitans des deux colonies passèrent à la Tortue, dans l’espérance d’un profit plus certain, soit par la facilité du commerce avec les étrangers, soit par les rapines des flibustiers. Quelques-uns s’attachèrent à la culture des terres, et plantèrent du tabac ; mais rien ne contribua tant au succès de ce petit établissement que le secours des vaisseaux français, surtout de Dieppe, qui commencèrent à le visiter. Ils y amenaient des engagés qu’ils vendaient pour trois ans, et dont on tirait les mêmes services que des esclaves nègres, ou américains. Ainsi la nouvelle colonie était alors