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plus tôt éloigné, que la double colonie retourna dans ses possessions. Mais quelques aventuriers de l’une et de l’autre, qui s’étaient approchés d’Espagnola dans leur fuite, ayant trouvé la côte septentrionale presque abandonnée par les Castillans, avaient pris le parti de s’y établir. Ils s’y étaient trouvés fort à l’aise, au milieu des bœufs et des porcs dont les bois et les campagnes étaient remplis. Ensuite les Hollandais, qui s’étaient alors établis au Brésil, leur ayant promis de fournir à tous leurs autres besoins, et de recevoir d’eux en paiement les cuirs qu’ils tireraient de leurs chasses, cette assurance acheva de les fixer.

La plupart de ces nouveaux colons étaient Normands. On leur donna le nom de boucaniers, parce qu’ils se réunissaient pour boucaner, à la manière des sauvages, la chair des bœufs qu’ils avaient tués. Ce terme, qu’on croit d’origine américaine, signifie cuire, ou plutôt sécher à la fumée ; et les lieux où se fait cette opération se nomment boucans.

Malgré le secours des Hollandais, il était fort incommode à la nouvelle colonie de ne recevoir que de leurs mains mille choses nécessaires. Elle fut bientôt délivrée de cet embarras. La plupart des boucaniers, qui avaient peu de goût pour la chasse des bêtes fauves, embrassèrent le métier de corsaires ; et, sans distinction de parti, tout ce qu’ils purent enlever leur parut de bonne prise. Outre ceux de Saint-Domingue, une troupe d’Anglais, mêlée