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et les enfans entrèrent à bord, et s’assirent au milieu du fond. Les hommes se rangèrent le long des bordages en dehors, chacun vis-à-vis du banc où il devait être assis, et les pagaies furent mises à côté de chaque place ; dans cet état, ils attendirent que les plus grosses lames fussent venues se briser à terre ; et quand le pilote jugea qu’il était temps de partir, il poussa un cri : aussitôt tous ceux qui étaient aux côtés du bâtiment le poussèrent dans l’eau de toutes leurs forces, et sautèrent dedans à mesure que l’endroit où ils devaient manier la pagaie entrait dans l’eau. Celui qui devait gouverner y sauta le dernier ; et tous ensemble se mirent à nager avec tant de force, qu’ils surmontèrent bientôt les grosses lames, quoiqu’à voir ces montagnes d’eau, on eût cru qu’elles devaient les rejeter bien loin sur la côte. Leur pilote était debout à l’arrière : il parait avec une adresse merveilleuse le choc des plus hautes vagues, en les prenant, non droit et de face, ou, suivant le langage des îles, le bout au corps, mais de biais. Aussi, dans l’instant que la pirogue s’élançait sur le côté de la même lame, elle était toute penchée jusqu’à ce qu’elle eût gagné toute la hauteur, où elle se redressait et disparaissait en s’enfonçant de l’autre côté. Elle ressortait aussitôt, et l’on voyait son avant tout en l’air, quand elle commençait à monter sur une autre lame : on l’aurait crue droite, jusqu’à ce qu’ayant gagné le dos de la seconde lame, il semblait qu’elle ne fût soute-