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sont les mauvais esprits ; ils donnent aux maboyas une origine qui renferme leur opinion sur la nature de l’âme. « Chaque homme, disent-ils, a dans le corps autant d’âmes que ses artères ont de battemens ; la principale est dans le cœur, d’où elle se rend au ciel après la mort, sous la conduite du bon génie qui lui a servi de guide pendant la vie ; et là elle jouit d’un bonheur qu’ils comparent à la plus heureuse vie qu’on puisse mener sur la terre. Les autres âmes, qui ne sont pas dans le cœur, se répandent dans les airs ; les unes au-dessus de la mer, où elles causent le naufrage des vaisseaux ; les autres au-dessus des terres et des forêts, où elles font tout le mal dont elles trouvent l’occasion. » Les idées des Caraïbes ne vont pas plus loin ; mais on y croit entrevoir qu’ils regardent l’âme du cœur comme le principe de tout ce que l’homme fait de bien ; et les autres âmes comme la source des vices et des crimes.

Ils ont dans chaque île plusieurs capitaines, qui sont ordinairement les chefs des plus nombreuses familles, et dont l’autorité n’est reconnue que pendant la guerre. Le nom de cacique, que les premiers Espagnols ont pris des Caraïbes, et qu’ils ont porté dans toutes les colonies, n’est plus qu’un vain titre auquel il n’y a point de pouvoir ni de prérogative attachés. Pendant la paix, un cacique n’est distingué des autres capitaines que par son titre et par une sorte de considération qui suit naturellement le mérite qu’on lui suppose. Pour devenir