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également que leurs jambes et leur mordans se détachent si facilement de leurs jointures, qu’on ne les y croirait que collés, et que, ces parties étant arrachées, il leur en revient d’autres l’année suivante. Ils changent d’écaille chaque année. Dans l’état où ils demeurent quelque temps, après s’en être dépouillés, on les appelle crabes boursiers : leur écaille n’est pas plus dure alors que du parchemin mouillé. Ils sont extrêmement faibles, et ne peuvent souffrir l’air jusqu’à ce que leur nouvelle peau ait acquis la dureté quiui convient. Le repos, et la nourriture dont ils ont fait provision avant de se retirer dans leur trou, les rend fort gras pendant cette métamorphose.

La chair des tourlouroux passe pour la plus délicate ; les crabes blancs sont les moins rerecherchés. Tous les voyageurs parlent de ces animaux comme d’une vraie manne pour les îles. Les Caraïbes n’ont presque point d’autres nourriture, les nègres en mangent au lieu de viande salée, que leurs maîtres négligent souvent de leur donner, malgré l’ordonnance ; les blancs mêmes ne sont pas indifférens pour les crabes, et l’on en sert sur toutes les tables.

La manière ordinaire de les prendre est d’aller la nuit autour des cannes et dans les bois avec un flambeau : c’est alors qu’ils sortent de leurs trous pour chercher leur nourriture, et la lumière du flambeau les faits découvrir. Il est aisé de les prendre par-dessus le dos et de les jeter ainsi dans un sac ; mais au moment qu’on