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de prendre les perroquets est ingénieuse pour des sauvages. Ils observent, à l’entrée de la nuit, les arbres où ces oiseaux se perchent, et dans l’obscurité, ils portent au pied de l’arbre des charbons allumés, sur lesquels ils mettent de la gomme et du piment vert. L’épaisse fumée qui en sort bientôt étourdit ces oiseaux jusqu’à les faire tomber comme ivres. Ils les prennent alors, leur lient les pieds et les ailes, et les font revenir en leur jetant de l’eau sur la tête. Si les arbres sont d’une hauteur qui ne permette point à la fumée d’y arriver, ils attachent au sommet d’une perche quelque vase de terre, dans lequel ils mettent du feu, de la gomme et du piment ; ils s’approchent autant qu’ils peuvent des oiseaux qu’ils veulent prendre, et les enivrent encore plus facilement. Ensuite, pour les apprivoiser, ils les font jeûner pendant quelque temps, et lorsqu’ils les croient bien affamés, ils leur présentent à manger. S’ils les trouvent encore revêches, ils leur soufflent au bec de la fumée de tabac, qui les étourdit jusqu’à leur faire perdre aussitôt toute leur férocité. Ces perroquets deviennent non-seulement fort privés, mais apprennent aussi facilement à parler que ceux qu’on a pris tout jeunes. Labat en acheta trois d’un Caraïbe pour vingt-deux sous marqués. C’est la seule monnaie que ces barbares connaissent. Un louis d’or ne vaut pas pour eux deux sous marqués, parce qu’ils attachent moins de prix à la matière qu’au nombre. Dans les comptes qu’on fait avec eux, on ob-