Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 17.djvu/297

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le canari, ressemble à de la bière forte : elle est rougeâtre, nourrissante et rafraîchissante, quoiqu’elle enivre aisément. On s’y accoutume aussi facilement qu’à la bière. Les Canadiens en font d’extrêmement forte, surtout lorsqu’ils la destinent pour quelque festin. C’est dans l’ivresse de cette liqueur que, se souvenant des moindres offenses, ils massacrent leurs ennemis sans pitié. Les Européens des îles, qui manquent de vin à leurs repas, ne boivent aussi que de l’ouycou, après quoi ils avalent un verre d’eau de cannes.

Le maby est une autre boisson qui n’est guère moins en usage. On met dans un canari vingt ou trente pots d’eau, deux pots de sirop clarifié, et douze patates rouges, avec autant d’oranges aigres coupées par quartiers. Cette liqueur fermente en moins de trente heures, et fait un vin clairet, aussi fin, dit-on, que le meilleur poiré de Normandie. Il est plus rafraîchissant et plus agréable que l’ouycou, mais plus dangereux : outre qu’il enivre plus facilement, il est si venteux que le moindre excès donne la colique.

Les nègres des sucreries font une boisson qu’ils appellent grappe. C’est du jus de canne qu’ils prennent lorsqu’il est bien écumé, et dans lequel ils mettent le jus de deux ou trois citrons. Cette liqueur, qui se boit chaude, est d’un excellent usage pour la poitrine ; elle soutient, elle désaltère, en un mot, elle produit l’effet du meilleur bouillon.