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cuite, et n’usent que de cassave, qu’ils aiment à manger chaude. Avant que les Européens leur eussent procuré des platines de fer, ils faisaient leur cassave sur de grandes pierres plates et minces, qu’ils rendaient propres à cet usage, en diminuant leur épaisseur. Au lieu de râpes de cuivre pour gruger le manioc, ils se servaient d’une petite planche de racine d’arbre, dans laquelle ils fichaient des petites pointes de caillou. Ils en font encore usage, lorsque les râpes de cuivre leur manquent. Pour exprimer le suc du manioc grugé, ils le mettent dans ce qu’ils nomment une couleuvre, qui est un cylindre de roseau refendu, de six à sept pieds de long, et de quatre ou cinq pouces de diamètre, dont ils attachent un bout à quelque branche d’arbre, ou au faîte de leur carbet. À l’autre bout, ils lient une grosse pierre, dont le poids, tirant la couleuvre, la fait rétrécir, et fait sortir tout le suc du manioc. Outre cette manière de lui ôter sa mauvaise qualité en le purgeant de son suc, les nègres marrons en ont deux autres, qu’ils pratiquent dans les lieux déserts où ils se retirent. L’une consiste à le couper en morceaux, qu’ils mettent tremper dans l’eau courante pendant sept ou huit heures. La seconde manière est de faire cuire le manioc entier sous la braise. D’ailleurs il paraît certain qu’il y a une espèce de manioc qui n’a point de qualité dangereuse. Labat, confirmant cette remarque, nous apprend qu’on le nomme camanioc, c’est-à-