Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 17.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

lins à sucre, et bientôt le fort Saint-Pierre, qui ne présente d’abord qu’une longue file de maisons appliquées, au pied de la montagne, parce qu’on ne distingue point encore la distance qui est entre la montagne et le rivage.

Les civilités que Labat reçut en arrivant lui auraient fait oublier tout d’un coup les fatigues et les dangers du voyage, s’il n’eût été menacé d’un autre péril dans le couvent même de son ordre. Un religieux de cette maison était attaqué du mal de Siam, et l’on s’efforçait d’en arrêter la contagion. Cette maladie était venue à la Martinique, où elle faisait de grands ravages depuis sept ou huit ans, non de Siam, mais par un vaisseau qui en rapportait les débris des établissemens de Merguy et de Bancok, et qui avait touché au Brésil, où quelques gens de l’équipage l’avaient gagnée. Elle était d’autant plus terrible qu’on n’en connaissait encore ni la nature ni le remède. Les symptômes en étaient aussi variés que le tempérament des malades. La mort arrivait le sixième, ou septième jour. Quelquefois, sans autre pressentiment qu’un léger mal de tête, on tombait mort dans les rues, où l’on était à se promener pour prendre l’air ; et ceux qui étaient si cruellement surpris avaient la chair noire et pourie un quart d’heure après. Les Anglais qu’on faisait prisonniers pendant la guerre prirent cette redoutable maladie, et la portèrent dans toutes les îles. Elle se communiqua de même chez les Espagnols et les Hollandais. Enfin il paraît