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des instrumens sans lesquels on ne pouvait entreprendre la culture du sucre ; mais ils ne suffisaient pas. Il fallait des richesses pour élever des bâtimens, pour se procurer des ustensiles. Le gain que firent quelques habitans avec les flibustiers, dont les expéditions étaient toujours heureuses, les mit en état d’employer les esclaves. On se livra donc à la plantation de ces cannes qui font passer l’or du Pérou aux mains des nations qui n’ont, au lieu de mines, que des terres fécondes.

Cependant la colonie, qui, même en se dépeuplant d’Européens, avait fait, au milieu des ravages qui précédèrent la paix de Ryswick, quelques progrès au nord et à l’ouest, n’était rien au sud. Cette partie ne comptait pas cent habitans, tous isolés et tous misérables. Le gouvernement n’imagina pas de meilleur parti, pour tirer quelque avantage d’un si grand terrain, que d’en accorder en 1698, pour un demi-siècle, la propriété à une compagnie qui prit le nom de Saint-Louis. Elle s’engageait, sous peine de voir son octroi annulé, à peupler sa concession de nègres et d’engagés. On la chargeait de distribuer des terres à ceux qui en demanderaient, et de leur fournir des esclaves et des marchandises payables à terme. À ces conditions, le privilége assurait à la compagnie le droit d’acheter et de vendre exclusivement dans tout le territoire qui lui avait été abandonné, mais seulement aux prix établis dans les autres quartiers de l’île.