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plus pour se procurer une belle négresse. Avec la régularité des traits, on veut qu’elles aient la taille belle, la peau fine et d’un noir luisant. Jamais il n’y a de malpropreté à leur reprocher lorsqu’elles sont proches d’une rivière. Les nègres du Sénégal, de Gambie, du cap Vert, d’Angola et de Congo, sont d’un plus beau noir que ceux de Mina, de Juida, d’Issini, d’Ardra, et des autres parties de la côte. Cependant leur teint change dès qu’ils sont malades, et devient alors couleur de bistre, ou même de cuivre.

Ils sont d’une patience admirable dans leurs maladies ; rarement on les entend crier ou se plaindre au milieu des plus rudes opérations. Ce n’est pas insensibilité, car ils ont la chair très-délicate et le sentiment fort vif ; c’est un fonds de grandeur d’âme et d’intrépidité qui leur fait mépriser la douleur, les dangers, et la mort même. Le P. Labat rend témoignage qu’il en a vu rompre vifs et tourmenter plusieurs, sans leur entendre jeter le moindre cri. « On en brûla un, dit-il, qui, loin d’en paraître ému, demanda un bout de tabac allumé lorsqu’il fut attaché au bûcher, et fumait encore tandis que ses jambes étaient crevées par la violence du feu. Un jour, ajoute le même voyageur, deux nègres ayant été condamnés, l’un au gibet, l’autre à recevoir le fouet de la main du bourreau, le confesseur se méprit et confessa celui qui ne devait pas mourir. On ne reconnut l’erreur qu’au moment de l’exécution. On le fit descendre, l’autre fut con-