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mourir de douleur en apprenant que leurs compagnons étaient tombés dans l’esclavage ou qu’ils avaient été maltraités par les Européens. Ils ne se consolent point d’avoir été chassés d’une partie de leurs îles, et souvent ils reprochent encore cette injustice aux vainqueurs. Ils ne peuvent s’accoutumer non plus à leur avarice ; c’est toujours un nouveau sujet d’admiration, incompréhensible pour un Caraïbe, de voir préférer l’or au verre et au cristal.

Le vol est à leurs yeux un crime fort noir. Ils laissent leurs habitations ouvertes et sans aucune défense : s’ils s’aperçoivent qu’on en ait enlevé quelque chose, ils en portent une espèce de deuil pendant plusieurs jours. Ensuite toute leur ardeur est pour la vengeance ; car autant ils ont d’affection les uns pour les autres, autant ils sont capables de haine lorsqu’ils se croient offensés. Un Caraïbe ne pardonne jamais.

Leurs maisons, qu’ils nomment carbets comme les Indiens de la Guiane, sont d’une forme singulière. Labat, qui eut l’occasion d’en voir une des plus belles, joint à sa description une peinture agréable des circonstances et de quelques usages de la nation. C’est dans ses termes qu’on va donner ce récit. « Le Caraïbe, maître du carbet, avait été baptisé aussi-bien que sa femme et dix ou douze enfans qu’il avait eus d’elle et de plusieurs autres. Il avait un caleçon de toile sur un habit neuf d’écarlate,