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rend moins de son que l’autre, quoiqu’il en rende un fort aigu, il ne sert qu’à faire du bruit, sans marquer la cadence ni les mouvemens des danseurs.

Ils sont disposés sur deux lignes, l’une devant l’autre, les hommes vis-à-vis des femmes. Ceux qui se lassent font un cercle autour des danseurs et des tambours. Un des plus habiles chante une chanson qu’il compose sur-le-champ, dont le refrain est répété par les spectateurs avec de grands battemens de mains. Tous les danseurs tiennent les bras à demi levés, sautent, tournent, s’approchent à deux ou trois pieds les uns des autres, et reculent en cadence, jusqu’à ce que le son redoublé du tambour les avertisse de se joindre en se frappant les uns contre les autres : ils se retirent aussitôt en pirouettant pour recommencer le même mouvement avec des gestes tout-à-fait lascifs, autant de fois que le tambour en donne le signal ; ce qu’il fait souvent plusieurs fois de suite. De temps en temps ils s’entrelacent les bras, et font deux ou trois tours, en continuant de se frapper et se donnant des baisers ; on juge combien la pudeur est blessée par cette danse. Cependant elle a tant de charmes pour les Espagnols de l’Amérique, et l’usage en est si bien établi parmi eux, qu’elle entre jusque dans leurs dévotions : ils la dansent à l’église et dans leurs processions. Les religieuses mêmes ne manquent guère de la danser, la nuit de Noël, sur un théâtre élevé dans leur chœur, vis-à-