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On sait que Louis xiii, sur l’ancien principe que les terres soumises aux rois de France rendent libres tous ceux qui peuvent s’y retirer, eut beaucoup de peine à consentir que les premiers habitans des îles eussent des esclaves, et ne se rendit qu’après s’être laissé persuader que c’était le plus sûr, et même l’unique moyen d’inspirer aux Africains le culte du vrai Dieu, de les tirer de l’idolâtrie, et de les faire persévérer jusqu’à la mort dans la profession du christianisme. L. P. Labat nous apprend que depuis on a proposé en Sorbonne les trois cas suivans : 1o. si les marchands qui vont acheter des esclaves en Afrique, ou les commis qui demeurent dans les comptoirs, peuvent acheter des nègres dérobés ; 2o. si les habitans de l’Amérique à qui ces marchands viennent les vendre peuvent acheter indifféremment tous les nègres qu’on leur présente, sans s’informer s’ils ont été volés ; 3o. à quelle réparation les uns et les autres sont obligés lorsqu’ils savent qu’ils ont acheté des nègres dérobés. « La décision, dit le même voyageur, fut apportée aux îles par un religieux de notre ordre. On y trouva des difficultés insurmontables. Nos habitans répondirent que les doteurs qu’on avait consultés n’avaient ni habitation aux îles ni intérêt dans les compagnies ; et que, s’ils eussent été dans l’un ou l’autre de ces deux cas, ils auraient décidé tout autrement. » Ainsi les Français des îles ne sont pas plus délicats sur ce point que les Anglais et