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de bâton et de nerf de bœuf : si l’on diffère, on se met quelquefois dans la nécessité d’en venir aux armes, et dans ces occasions ils se défendent en furieux. Dès qu’ils se persuadent qu’il faut mourir, peu leur importe comment ; et le moindre succès achève de les rendre invincibles.

On remarque encore que le chant parmi ces peuples est un signe fort équivoque de gaieté ou de tristesse. lis chantent dans l’affliction pour adoucir leur chagrin ; ils chantent dans la joie pour faire éclater leur contentement ; mais comme ils ont des airs joyeux et des airs lugubres, il faut une longue expérience pour les distinguer. Naturellement ils sont doux, humains, dociles, crédules, et superstitieux à l’excès. Ils ne peuvent haïr long-temps ; ils ne connaissent ni l’envie, ni la mauvaise foi, ni la médisance. Le christianisme, qu’on n’a pas de peine à leur faire embrasser, et les instructions qu’ils reçoivent continuellement des missionnaires, perfectionnent quelquefois ces vertus.

« Ce sont les nègres, dit le P. Pers, qui nous attirent ici principalement ; et sans eux, nous n’oserions aspirer à la qualité de missionnaires. Il se passe peu d’années sans qu’on en amène au seul Cap-Français deux à trois mille. Lorsque j’apprends qu’il en est arrivé quelques-uns dans mon quartier, je vais les voir, et je commence par leur faire faire le signe de la croix, en conduisant leur main ; et puis je