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rent sous ses ordres à la fin de septembre ; mais, en approchant de Monte-Christo, ils furent surpris de lui voir prendre le large, mettre à l’avant du navire deux canons chargés à mitraille, avec des canonniers prêts à faire feu, et placer sur le pont son équipage armé de pistolets et de sabres. Lorsqu’ils lui demandèrent la cause de cette conduite, il leur reprocha d’avoir pris la résolution de se saisir de son vaisseau. Ce soupçon n’était pas sans vraisemblance ; mais, sur quelque fondement qu’il l’eût conçu, il continua sa route avec les mêmes précautions, et presque toujours hors de la vue de terre. En arrivant à l’extrémité occidentale de l’île, il feignit d’avoir manqué le port de Paix, où il avait ordre de débarquer sa malheureuse troupe ; il se plaignit de manquer de vivres ; il accusa les vents contraires qui ne lui permettaient pas d’aller plus loin : enfin il déclara qu’il était forcé de mettre tous les Français à terre. Aussitôt les hommes furent embarqués dans deux chaloupes, sous prétexte de leur faire chercher des habitans de leur nation pour les secourir ; mais il retint leurs hardes en leur représentant qu’elles ne feraient que les embarrasser ; ensuite, ayant fouillé les femmes et les enfans, qu’il laissa presque nus sur le rivage, il mit à la voile et disparut. Quelques Français, qui se trouvèrent heureusement dans ce canton, ne manquèrent point de faire un accueil fort tendre à ces misérables, et les plus riches habitans de l’île s’empressèrent bientôt