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tolu, du nom d’un village autour duquel cet arbre croît en abondance.

Le gaïac et l’ébénier de montagne (bauhima acuminata) ont presque la dureté du fer. Les béjusques, plantes sarmenteuses et pliantes, sont très-propres à faire des liens. Une autre plante grimpante est le fevillea cordifolia, dont le fruit se nomme habilla, ou fève de Carthagène. C’est une baie grosse, sphérique, enveloppée d’une écorce dure, et contenant trois loges, qui renferment chacune plusieurs graines. On assure que ces graines sont le plus excellent de tous les antidotes contre la morsure de toutes sortes de serpens. Il suffit, disent les voyageurs, d’en manger immédiatement après la blessure pour arrêter aussitôt le cours du venin, et pour en dissiper tous les effets. C’est un préservatif comme un remède ; et cette opinion est si bien établie, que les chasseurs et les ouvriers ne vont jamais sur les montagnes sans en avoir pris un peu à jeun ; après quoi ils marchent et travaillent librement, comme si cette précaution les rendait invulnérables. L’habilla de Carthagène est chaude au plus haut degré ; aussi en mange-t-on si peu, que la dose ordinaire n’est que la quatrième partie d’un noyau ; et lorsqu’on l’a prise, il faut se bien garder de boire sur-le-champ aucune liqueur capable d’échauffer. Ulloa, qui donne ici son témoignage pour garant, fondé, dit-il, sur l’expérience, ajoute que ce fruit n’est point inconnu dans d’autres contrées de l’Amérique, et que ses