sipa. Il est si grand, qu’à peine peut-on le traverser en canot dans l’espace d’un jour ; plusieurs rivières s’y jettent, et le sable que l’on y trouve pendant l’été est ordinairement mêlé de grains d’or. Au delà du Caroni on rencontre l’Arvi, qui passe le long du lac, à l’ouest, et vient se jeter aussi dans l’Orénoque. Les deux rivières forment entre elles une espèce d’île, dont Raleigh vante la fertilité et l’agrément. Mais il paraît ici fort embarrassé à rapporter ce qu’il ne sait, dit-il, que sur le témoignage d’autrui, et dont il avoue néanmoins qu’il ne lui est pas resté le moindre doute. « La rivière d’Arvi en a deux autres assez près d’elle, l’Atoïca et le Caora. Sur les bords de la seconde on trouve une nation d’Indiens qui ont la tête tout d’une pièce avec les épaules ; ce qui doit paraître monstrueux[1], continue Raleigh, et ce que je ne laisse pas de croire certain. Ces Indiens extraordinaires se nomment les Eouaipanomas. On prétend qu’ils ont les yeux sur les épaules, la bouche dans la poitrine, et les cheveux sur le dos. Le fils de Topiaouari, que j’emmenai en Angleterre, m’assura que c’est la plus redoutable nation de
- ↑ On n’a pu se dispenser de rapporter ce trait d’après un voyageur tel que le chevalier Raleigh ; mais une partie du merveilleux disparaîtra, si l’on suppose que l’usage de cette nation est de rendre le cou fort court aux enfans, par quelque pratique semblable à celle d’un autre peuple de l’Amérique, qui aplatit la tête des siens avec des ais constamment appliqués et serrés. D’ailleurs les Indiens de la Guiane et les Espagnols de Cumana peuvent être soupçonnés d’un peu d’exagération.