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paraître abattu, il regarde d’un air fier ceux qui se présentent sur son passage ; il leur raconte hardiment ses exploits, surtout la manière dont il a souvent lié les ennemis de sa nation, et dont il les a rôtis et mangés, et leur prédit que sa mort ne demeurera pas sans vengeance, et qu’ils seront un jour mangés comme lui. Lorsqu’il a servi quelque temps de spectacle, et reçu les injures qu’on lui rend, ses deux gardes reculent, l’un à droite et l’autre à gauche, à la distance de huit ou dix pieds, tirant à mesure égale la corde dont ils le tiennent lié, de sorte qu’il ne peut faire un pas au milieu d’eux. On apporte à ses pieds un tas de pierres, et les gardes, se couvrant de leurs boucliers, lui déclarent qu’avant sa mort on lui laisse le pouvoir de la venger. Alors, entrant en fureur, il prend des pierres et les jette contre ceux qui l’environnent. Avec quelque soin qu’ils se retirent, il y en a toujours un grand nombre de blessés.

Aussitôt qu’il a jeté toutes ses pierres, celui dont il doit recevoir la mort, et qui ne s’est pas montré pendant toute cette scène, s’avance la tacape à la main, parée de ses plus belles plumes. Il tient quelques discours au captif, et ce court entretien renferme l’accusation et la sentence. Il lui demande s’il n’est pas vrai qu’il a tué et mangé plusieurs de ses compagnons. L’autre se fait gloire d’un prompt aveu, et défie même son bourreau par une formule énergique dans les langues du pays. « Rends-moi