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de se baigner, chaque fois qu’elles rencontrent une rivière ou un ruisseau. Cette commodité étant une des raisons qu’elles alléguaient aux Européens qui voulaient les forcer de porter des habits, rien n’était si difficile que de les y engager.

Les Brasiliens se nourrissent ordinairement de deux sortes de racines, l’aipy et le manioc. Ces plantes se cultivent, et n’ont pas besoin d’être plus de trois mois en terre pour devenir hautes d’un demi-pied et de la grosseur du bras. On les fait sécher au feu sur des claies ; et, les ratissant avec des pierres aiguisées, on en fait une farine dont l’odeur tire sur celle de l’amidon. Cette farine se cuit dans de grands pots, avec le soin de la remuer jusqu’à ce qu’elle s’épaississe. Refroidie dans une certaine consistance, son goût diffère peu de celui du pain blanc. Celle dont on fait provision dans les courses et les guerres est assez cuite pour se durcir. Elles sont toutes deux fort nourrissantes ; et de l’une comme de l’autre, apprêtées avec du jus de viande, on fait un mets qui approche du riz bouilli. Les mêmes racines, pilées dans leur fraîcheur, donnent un jus de la blancheur du lait, qui ne demande que d’être exposé au soleil pour s’y coaguler comme le fromage, et qui fait ensuite un bon aliment, pour peu qu’il soit cuit au feu. Comme on ne fait que le renverser dans une poêle de terre pour le cuire, Léry le compare à nos omelettes.