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tages avec une modération qui donnait un nouveau lustre à ses victoires dans les occasions mêmes où, pour affaiblir ses ennemis, il en aurait pu manquer sans reproche. Un jour, par exemple, qu’il les avait repoussés avec un grand carnage, soixante-dix Espagnols, que la fuite avait dérobés au fer des vainqueurs, rencontrèrent une caverne creusée dans le roc, et s’y cachèrent dans l’espoir de gagner la plaine à la faveur de la nuit. Ils y furent découverts par un parti d’Américains, qui, environnant la caverne, en bouchèrent toutes les ouvertures avec du bois et d’autres matières combustibles, dans le dessein d’y mettre le feu. Henri survint ; il condamna la barbarie de ces furieux, et faisant déboucher la caverne, il laissa aux Espagnols la liberté de se retirer, après s’être contenté de leur ôter leurs armes. C’était souvent l’unique butin qu’il faisait sur eux ; mais il en tirait l’avantage d’armer insensiblement ses soldats, qui commencèrent bientôt à manier parfaitement les armes de l’Europe, à l’exception de l’arquebuse, dont ils ne purent jamais faire usage.

Il parut fort surprenant aux Espagnols que des sauvages, contre lesquels ils ne daignaient employer ordinairement que des chiens, fussent capables, non-seulement de leur tenir tête, mais de les battre. Cependant ils ne connaissaient point encore tout ce qu’ils avaient à craindre de leur chef. Le jeune cacique, loin