Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/309

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

longue conférence, n’attendirent point les ordres du général pour quitter leurs rangs, et quelques-uns montèrent sur une petite tour, où ils avaient découvert une idole enrichie de plaques d’or et de pierres précieuses qu’ils se mirent à piller. Leur audace irrita les Péruviens, et la plupart se disposaient à punir ce sacrilège ; mais l’inca défendit que les Espagnols fussent maltraités. Valverde, alarmé du bruit, se leva brusquement du siége qu’on lui avait donné pour parler, et dans ce mouvement il laissa tomber la croix et son bréviaire. Il se baissa pour les relever : ensuite, courant vers les Espagnols, il leur cria de ne faire aucun mal aux Américains. Sa course et ses cris furent mal expliqués, et passèrent au contraire pour une exhortation à la vengeance. On fondit de tous côtés sur les Américains ; et ce qui est bien remarquable, c’est que, malgré une attaque si furieuse, l’ordre qu’avait donné Atahualpa de ne pas frapper les Espagnols fut généralement observé. Cent soixante Espagnols enveloppés par une armée n’eurent ni mort ni blessé, à la réserve du gouverneur, qu’un de ses propres soldats blessa légèrement à la main. Ils ne trouvèrent aucune sorte de résistance. Les Péruviens se contentèrent d’entourer la litière du prince pour empêcher qu’elle ne fût renversée ; mais le gouverneur s’étant fait jour îusqu’à la litière, prit Atahualpa par la manche de sa robe, tomba et l’entraîna sur lui.