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dans la chaloupe un matelot nommé Bocca-Negra, que les Américains aidèrent de bonne grâce à charger vingt pipes d’eau. L’officier américain, qui se nommait Orgo, continua de s’expliquer par les interprètes ; il fit diverses questions, auxquelles Pizarre répondit qu’il venait de Castille ; qu’il était sujet d’un roi fort puissant ; que par ses ordres il avait fait le tour du monde pour venir apprendre aux Américains que les divinités qu’ils adoraient étaient fausses, et pour leur faire connaître un Dieu créateur du ciel et de la terre, qui promettait une éternité de bonheur à ceux qui observaient ses lois. Il parla d’un lieu obscur et plein de feu, destiné à la punition de ceux qui ne les reconnaissaient pas. Orgo parut épouvanté de ce qu’on lui faisait entendre, et n’en prit pas moins de plaisir à boire du vin de Castille, qu’il trouvait fort au-dessus du sien. On lui fit présent d’une hache de fer dont il parut faire beaucoup de cas, et de quelques bijoux de l’Europe pour son cacique. En se retirant, il pria le capitaine de laisser descendre à terre quelques-uns de ses gens. Alfonse de Molina consentit à le suivre avec un nègre qui servait Pizarre.

Lorsqu’ils furent au rivage, tous les Américains qui s’y étaient assemblés marquèrent une égale admiration pour la blancheur de l’un et pour la noirceur de l’autre ; ils lavaient le nègre pour essayer s’ils feraient disparaître sa couleur. Molina ne fit pas difficulté de se