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reau noir qui est naturellement imprégné de sel. On enlève peu à peu ce sel en arrosant le sol avec de l’eau du lac : le terrain devient d’autant plus fertile, que l’on répète plus souvent cette lixiviation. Ce procédé réussit même avec l’eau salée du lac de Tezcuco, parce que, ne l’étant qu’à un degré très-faible, elle est encore propre à dissoudre le sel à mesure qu’elle filtre à travers le terreau. Les chinampas renferment quelquefois jusqu’à la cabane de l’Indien qui sert de garde pour un groupe de jardins flottans. On les tire, ou bien on les pousse avec de longues perches, pour les transporter à volonté d’un rivage à l’autre.

Suivant un ancien voyageur, les Indiens se construisent sur ces jardins flottans des maisons de bois accompagnées de petits bâtimens pour la volaille, et des colombiers. Il arrive quelquefois que le maître d’une île, étant allé vendre ses denrées dans son canot avec sa femme et ses enfans, ne retrouve plus à son retour son habitation dans le lieu où il l’avait laissée, parce que les cordages qui l’arrêtaient se sont rompus de pouriture, et l’ont abandonnée à l’inconstance du vent. Alors il demande à ses voisins s’ils n’ont pas vu passer son île ; et la retrouvant à force de recherches et d’informations, il la remorque avec de nouvelles cordes. Waffer, à qui l’on doit ce récit, le tenait d’un Espagnol ; de sorte qu’il n’est pas garant de ce que celui-ci a pu ajouter à la vérité.