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sont remplies de vaches sauvages. On les rencontre quelquefois par milliers dans les campagnes ; les Espagnols ne leur font la guerre que pour leurs peaux. Ceux qui se plaisent à cette chasse, ou qui s’en font un métier, ont des chevaux dressés exprès, qui s’avancent ou reculent avec tant d’intelligence, que le cavalier n’a pas d’embarras à les conduire. Ils ont pour arme un croissant de fer dont le tranchant est fort aigu, qui a six ou sept pouces d’une extrémité à l’autre, et qui est fixé par une douille, au bout d’une hampe de quatorze ou quinze pieds de long : le chasseur en pose le bout sur la tête de son cheval, le fer en avant, et court après la bête. S’il la joint, il lui enfonce son fer au-dessus du jarret, dont il tâche de couper les ligamens ; son cheval fait aussitôt un détour à gauche pour éviter l’animal furieux, qui ne manque point, lorsqu’il se sent blessé, de courir sur lui de toute sa force : si les ligamens ne sont pas tout-à-fait coupés, il les rompt bientôt à force d’agiter sa jambe ; ou bien, s’il continue de courir sur son ennemi, ce n’est plus qu’en boitant. Le chasseur, après s’être éloigné au grand galop, se rapproche à petits pas, et de son fer frappe le taureau sur une des jambes de devant : ce coup le renverse ; alors le chasseur descend, tire un grand couteau fort pointu dont les hommes de cette profession sont toujours armés, et dont ils se servent avec beaucoup d’adresse : un seul coup sur la nuque, un peu au-dessous des