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liées entre elles par de petites solives qui les traversaient, offraient une infinité d’autres têtes enfilées successivement par les tempes. Le nombre en était si grand, que les Espagnols en comptèrent plus de cent trente mille, sans y comprendre celles dont les tours étaient composées. La ville entretenait plusieurs personnes qui n’avaient point d’autre fonction que de replacer les têtes qui tombaient, d’en remettre de nouvelles, et de conserver l’ordre établi dans cet abominable lieu.

Après avoir parlé tant de fois des sacrifices du Mexique et des victimes humaines, on doit au lecteur une peinture de ces épouvantables fêtes. Tous les historiens conviennent qu’il ne s’en trouve point d’exemple aussi révoltant pour l’humanité, dans les plus barbares nations de l’Afrique et des deux Indes. C’était dans la vue d’immoler paisiblement des hommes à leurs dieux que les Mexicains épargnaient le sang de leurs ennemis pendant la guerre, et qu’ils s’efforçaient de faire un grand nombre de prisonniers vivans. Montezuma ne fit pas difficulté d’avouer à Cortez que, malgré le pouvoir qu’il avait de conquérir la province de Tlascala, il se refusait cette gloire, pour ne pas manquer d’ennemis et pour assurer des victimes à ses temples ; et l’on a vu que le premier devoir des empereurs, après leur élection, était d’enlever des captifs et de les présenter au couteau des prêtres.

Herréra décrit les cérémonies du sacrifice.