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assis à sa droite. Le chancelier Catinara, l’évêque de Badajos et les autres conseillers d’état étaient à sa gauche. Las Casas et un franciscain, de même avis que lui, se tinrent debout vis-à-vis le roi. Lorsque chacun fut placé, de Chièvres et le chancelier, montant chacun de leur côté les degrés du trône, se mirent à genoux aux pieds du roi, et lui parlèrent quelque temps à voix basse ; ensuite ils reprirent leur place, et le chancelier, se tournant vers l’évêque de Darien, lui dit : « Révérend évêque, sa majesté vous ordonne de parler, si vous avez quelque chose à lui dire. » L’évêque se leva aussitôt, et répondit que les explications qu’il avait à donner ne pouvant être communiquées qu’au roi et à son conseil, il suppliait sa majesté de faire éloigner ceux qui ne devaient pas les entendre. Il insista même après un second ordre, et ce ne fut qu’au troisième, lorsque le chancelier eut ajouté que tout ce qu’il y avait de seigneurs dans la salle avait été appelé pour assister au conseil, qu’il prit le parti d’obéir ; mais, évitant les détails, il se contenta de déclarer que, depuis cinq ans qu’il s’était rendu au continent de l’Amérique avec la dignité épiscopale, il ne s’y était rien fait pour le service de Dieu ni pour celui du prince ; que la colonie se perdait au lieu de s’établir ; que le premier gouverneur qu’il y avait vu était un méchant homme, que le second était encore pire, et que tout allait si mal, qu’il s’était cru obligé de passer en Espagne pour en informer