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temps qu’on n’en met pour aller du buffet à la table. Le cacique Dabayda, seigneur de la contrée qui s’étend au-delà du Rio Negro, était dans son palais, c’est-à-dire sur son arbre, lorsqu’il vit paraître les Castillans ; il se hâta de faire lever les échelles ; ils l’appelèrent à haute voix, et l’exhortèrent à descendre sans crainte ; il répondit qu’il n’avait offensé personne, et que, n’ayant rien à démêler avec des étrangers qu’il ne connaissait pas, il demandait en grâce qu’on le laissât tranquille dans sa maison. On le menaça de couper les arbres par le pied ou d’y mettre le feu, et, sur le refus qu’il fit encore, on mit la hache au pied de l’arbre qu’il habitait. Déjà les morceaux volaient en éclats : il se détermina enfin à descendre avec sa femme et deux de ses fils. On lui demanda s’il avait de l’or ; il répondit qu’il n’en avait point dans ce lieu, parce que ce métal ne lui était d’aucun usage pour vivre ; mais que, si les Castillans en désiraient avec tant d’ardeur, qu’ils se crussent en droit de troubler le repos d’autrui pour en obtenir, il était prêt à leur en faire apporter d’une montagne voisine. Ils prirent d’autant plus de confiance en cette promesse, qu’il leur laissa sa femme et ses deux fils pour gage de son retour ; mais après l’avoir inutilement attendu pendant plusieurs jours, ils reconnurent qu’ils avaient été trompés, et que leurs otages mêmes, qu’ils avaient fait remonter dans leurs maisons, d’où ils ne s’imaginaient pas qu’ils pussent descendre sans échelles, avaient