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se lassent pas de chercher. Ils ne pensent à venir ici que dans l’espérance de l’y trouver. Célébrons une fête à son honneur pour obtenir sa protection. » Aussitôt ils se mirent tous à chanter et à danser autour du panier. Ces fêtes durent une nuit entière, suivant l’ancien usage du pays, et ne finissent ordinairement que lorsque tout le monde est tombé d’ivresse ou de fatigue. On remarque que les chants de Cuba étaient plus doux et plus harmonieux que ceux d’Espagnola. Après cette cérémonie, Hatuey rassembla tous ses Américains pour leur dire qu’ayant beaucoup réfléchi sur le sujet de leurs craintes, il n’avait pas encore l’esprit tranquille, et qu’il ne voyait aucune sûreté pour eux tant que le dieu des Espagnols serait dans leur canton. « Vous le cacheriez en vain, continua-t-il : quand vous l’avaleriez, ils vous éventreraient pour le chercher au fond de vos entrailles. » Il ajouta qu’il ne connaissait qu’un lieu où ils pussent le mettre pour s’en défaire ; c’était le fond de la mer ; et que, lorsqu’ils ne l’auraient plus parmi eux, il se flattait qu’on les laisserait en repos. Cet expédient leur parut infaillible, et tout l’or qu’ils possédaient fut jeté en effet dans les flots.

Ils furent extrêmement surpris lorsqu’ils n’en virent pas moins arriver les Espagnols. Hatuey s’opposa d’abord au débarquement ; mais, aux premières décharges des arquebuses, une multitude d’Américains qui bordaient le rivage prit la fuite vers les bois, et Vélasquez ne jugea