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vant-garde à Ordaz, avec les plus fidèles Tlascalans pour guides ; et l’aventure du lac, dont il ne pouvait se consoler, lui fit prendre le parti de demeurer lui-même à l’arrière-garde pour assurer la tranquillité des autres aux dépens de la sienne. On fit deux lieues dans les ténèbres ; et la pointe du jour ayant fait découvrir un autre temple moins élevé que le premier, mais assez bien situé pour n’y laisser craindre aucune attaque, on s’y arrêta, dans le seul dessein d’observer la campagne et de prendre de nouvelles mesures pour la marche du jour. Quelques troupes de paysans qui couraient en désordre n’empêchèrent point l’armée de quitter ce poste pour continuer sa marche à leurs yeux. Elle essuya leurs cris, leurs insultes, et les pierres qu’ils jetaient des montagnes, mais sans être obligée d’en venir aux armes. Deux lieues plus loin, on reconnut un bourg dont Cortez résolut de s’ouvrir l’entrée pour s’y procurer des rafraîchissemens à toutes sortes de risques. On eut peu de peine à mettre les habitans en fuite ; mais on trouva si peu de vivres, qu’après y avoir passé un jour, on continua la marche par un pays rude et stérile, où les difficultés et le besoin ne firent qu’augmenter. La faim et la soif avaient jeté les soldats dans le dernier accablement. Ils étaient réduits à manger les herbes et les racines, sans en connaître la nature, et sur le témoignage des seuls Tlascalans, qu’on détachait continuellement pour les cueillir. Un cheval blessé qui mou-