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agitations ; et ce témoignage de sensibilité le fit chérir de ses troupes, autant que sa prudence et son courage l’en avaient toujours fait respecter.

Il eut un bonheur auquel il s’attendait peu. Les Mexicains lui donnèrent le temps de respirer. Cette inaction de ses ennemis vint d’un accident qu’il ignorait, et qu’il n’apprit que par d’autres événemens. Deux des fils de Montézuma, qui n’avaient pas quitté leur père depuis l’arrivée des Espagnols, se trouvèrent entre les prisonniers qui avaient été massacrés. Ces malheureux princes ayant été reconnus, le peuple de Mexico, qui respectait le sang impérial jusqu’à l’adoration, fut saisi d’une sorte de terreur qui se répandit dans tous les ordres de l’état. Le nouvel empereur, forcé d’entrer dans la douleur publique, pour flatter l’esprit de ses sujets, fit suspendre tous les mouvemens de guerre, et donna ordre que les funérailles des deux princes fussent commencés avec les cris et les gémissemens ordinaires, jusqu’au jour où leurs corps devaient être conduits à la sépulture de leurs ancêtres. Ainsi les vertus des Mexicains tournèrent plus d’une fois contre eux, et combattirent pour leurs ennemis.

L’armée se mit en marche vers Tlascala sous la conduite des troupes de cette nation : elle ne fut pas long-temps sans découvrir quelques compagnies de Mexicains qui la suivaient sans oser

    Nouvelle Espagne, on ne lui donne d’autre nom que Noche triste, la triste Nuit.