Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 13.djvu/337

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la nuit. Ceux qui préféraient le jour faisaient valoir la difficulté de marcher dans les ténèbres, avec l’artillerie et le bagage, par des routes incertaines, élevées sur l’eau, avec l’embarras de jeter des ponts et de reconnaître les passages. Les autres se formaient des images encore plus terribles d’une retraite en plein jour, tandis que les travaux de l’ennemi devaient faire juger qu’il était résolu d’embarrasser leur sortie. Quel moyen de risquer un combat continuel au passage du lac, où l’on ne pouvait dresser les rangs, ni se servir de la cavalerie, sans compter qu’on aurait les flancs découverts aux canots des Mexicains dans le temps qu’il faudrait encore les percer en tête et les soutenir par-derrière ? La plupart des voix se réunirent pour la résolution de partir la nuit ; et Cortez, qui n’avait remis ce point à la pluralité des suffrages que pour éviter de prendre sur soi l’événement, parut se rendre à l’opinion du plus grand nombre. Une si grande entreprise ne fut pas renvoyée plus loin qu’à la nuit suivante, dans la crainte de laisser du temps aux ennemis pour augmenter les obstacles. On pressa si vivement la construction du pont, qu’il fut achevé à la fin du jour ; mais cette précipitation fit oublier que, les Mexicains ayant déjà rompu la digue en plusieurs endroits, on avait besoin de plus d’un pont ; ou plutôt on se reposa trop sur la facilité qu’on se promettait à le transporter d’un canal à l’autre.