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Enfin la sédition reprit toute sa force. On entendit crier que Montézuma n’était plus empereur du Mexique ; qu’il était un lâche, un traître, et le vil esclave des ennemis de la nation. En vain s’efforça-t-il de s’attirer de l’attention par divers signes. Les cris furent accompagnés d’une nuée de traits qui paraissaient lancés contre lui. Deux soldats espagnols que Cortez lui avait donnés pour garde le couvrirent de leurs boucliers ; mais tous leurs soins ne purent le garantir de plusieurs coups de flèches, ni d’une pierre qui l’atteignit à la tête, et qui le fit tomber sans aucun sentiment. Cet accident fut ressenti de Cortez comme le plus cruel contre-temps qui pût arriver. Il fit transporter ce malheureux monarque à son appartement ; et, dans son premier trouble, il courut à la défense avec un emportement terrible ; mais il se vit privé de la satisfaction de se venger. Les ennemis n’eurent pas plus tôt vu tomber leur maître, que, reconnaissant l’énormité de leur crime, ils furent saisis d’une affreuse épouvante qui les fit fuir et disparaître en un moment, comme s’ils eussent été poursuivis par la colère du ciel.

L’empereur était revenu à lui, mais avec tant de désespoir et d’impatience, qu’il fallut retenir ses mains pour l’empêcher d’attenter à sa vie. Il ne pouvait soutenir l’idée d’avoir été réduit à cet état par ses sujets. Il rejetait les secours ; il poussait d’effroyables menaces, qui se terminaient par des gémissemens et des