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le fit sortir aussitôt de son quartier pour tenir la campagne, mais avec une confusion qui répondait à celle de ses idées. Il fit publier encore une fois la guerre : il mit la tête de Cortez à prix pour deux mille écus, et celles de Sandoval et de Vélasquez pour quelque chose de moins. Ses ordres étaient mêlés de menaces ; il en donnait plusieurs à la fois : on découvrait un air de crainte dans le mépris qu’il affectait pour Cortez. Enfin son armée se mit d’elle-même en bataille, comme par hasard, et sans attendre ses ordres. Après l’avoir fait avancer l’espace d’un quart de lieue, il résolut d’attendre l’ennemi, dans la folle persuasion que Cortez, malgré son habileté, pourrait oublier le désavantage du nombre, et que la force de ses ressentimens lui ferait quitter son poste. Il passa tout le jour dans cette situation. La nuit approchait, lorsqu’un nuage, où le soleil se cacha tout à coup, répandit une pluie si froide et si abondante, que tous ses soldats demandèrent d’être reconduits au quartier : il céda facilement à leurs instances.

Cortez, qui fut bientôt averti de cette retraite, regretta beaucoup que le ruisseau sur le bord duquel il avait son camp fût trop enflé par la pluie pour lui permettre de le passer à gué, et de tomber sur un ennemi qui semblait fuir ; mais son génie guerrier, et le fond qu’il faisait sur ses intelligences, lui inspirèrent un dessein qui demandait toute sa hardiesse pour le tenter, et la confiance qu’il avait