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seule, qu’il maniait avec une adresse surprenante, le délivra heureusement de tous ses ennemis. Jamais personne en effet ne fut plus propre pour un coup de main, et pour l’exécution des grandes entreprises qui ne demandent que du courage et de la fermeté. Jamais on n’eut le cœur plus haut ni plus de mépris pour la fortune ; mais il avait besoin d’être conduit : il manqua toujours de prudence et de bonheur.

D’un autre côté, les habitans de Saint-Sébastien avant vu expirer les cinquante jours pendant lesquels ils avaient promis d’attendre leur gouverneur, pressèrent Pizarre de leur faire quitter un pays où il ne leur restait aucune assurance de s’établir ; mais, lorsqu’ils voulurent s’embarquer, les deux brigantins qu’ils avaient conservés se trouvèrent trop petits pour contenir soixante hommes, dont leur troupe était encore composée. Ils convinrent entre eux d’attendre que la misère et les flèches des ennemis eussent diminué ce nombre ; et ce qu’ils désiraient arriva plus tôt encore qu’ils ne l’avaient prévu. Alors ils tuèrent quatre chevaux, qu’ils avaient épargnés dans les plus grandes extrémités, parce que la seule vue de ces animaux épouvantait les Américains ; et les ayant salés pour leur unique provision, ils se partagèrent sur les deux bâtimens. Pizarre monta l’un, et donna le commandement de l’autre à un Flamand qui entendait fort bien la navigation ; mais ils n’étaient pas bien loin