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vaëz, qui rendait justice au mérite d’Ojéda, lui tendit la main avec autant de respect que d’amitié. Esquibel le reçut dans sa maison, et le fit servir avec les plus grands honneurs ; après quelques jours de repos, il le fit conduire à Espagnola. Talavera n’eut pas la hardiesse de le suivre dans un lieu où il ne pouvait éviter le châtiment de ses crimes ; mais, ayant demeuré trop long-temps à la Jamaïque, il n’y fut pas moins arrêté par l’ordre de l’amiral, et condamné au dernier supplice.

En arrivant à San-Domingo, Ojéda eut le chagrin d’apprendre qu’Enciso en était parti depuis long-temps pour conduire à Saint-Sébastien un grand convoi d’hommes et de vivres. Comme dans toute sa route il n’en avait appris aucune nouvelle, il ne douta point qu’il n’eût péri dans les flots, ou par les armes des Américains ; et, loin de perdre courage, il se flatta que le secours de ses amis lui ferait bientôt réparer toutes ses pertes ; mais son terme était arrivé : il mourut si pauvre, qu’on ne lui trouva pas de quoi le faire enterrer. Dans le peu de séjour qu’il avait fait à San-Domingo, il avait donné une nouvelle preuve de cette intrépidité qui l’avait rendu célèbre pendant toute sa vie. Il fut attaqué la nuit par plusieurs personnes qui croyaient avoir à lui reprocher la perte de leurs biens, et qui avaient juré d’en tirer vengeance. Loin d’être effrayé du nombre, il se jeta au milieu d’eux, comme il avait toujours fait dans les combats ; et son épée