Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 13.djvu/27

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rencontra au bout de cette marche, et dont il se flatta de trouver bientôt la fin, n’avait pas moins de trente lieues de longueur. Cependant, comme il s’y trouvait engagé, sans aucune apparence de pouvoir pénétrer dans les terres, au milieu d’une multitude innombrable d’ennemis, il continua cette route, souvent avec de l’eau jusqu’à la ceinture, manquant de vivres, n’ayant pour boire que de l’eau bourbeuse où il marchait, et trop heureux lorsqu’il pouvait rencontrer quelques mangliers pour s’y percher pendant la nuit. Enfin, réduit à trente-cinq hommes de plus du double qu’il avait en arrivant dans l’île, et si faible, qu’il avait peine à se traîner, il entra sur les terres d’un cacique dans lequel il trouva quelques sentimens de pitié : il obtint du temps et du secours pour rétablir ses forces. De là étant passé chez un autre cacique qui ne le reçut pas avec moins d’affection, et qui n’était éloigné que d’environ vingt lieues de la Jamaïque, il fit passer dans cette île un Castillan nommé Pierre d’Ordas pour aller demander du secours à Esquibel, quoique cet Espagnol fût son ennemi.

Ordas présenta au gouverneur de la Jamaïque une lettre de son général, qui le conjurait de ne le pas abandonner dans son infortune. Esquibel heureusement se piqua de générosité, et se hâta d’armer une caravelle qu’il fit partir sous les ordres de Pamphile de Narvaëz. Ce secours arriva heureusement à Cuba : et Nar-