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d’un air gai et caressant. Il lui dit qu’on venait de punir des traîtres qui avaient eu l’insolence de noircir la réputation de leur souverain ; et, l’ayant félicité du courage qu’il avait eu lui-même de satisfaire à la justice du ciel par le sacrifice de quelques heures de liberté, il lui fit ôter ses fers. Quelques relations assurent qu’il se mit à genoux pour les lui ôter de ses propres mains ; ce qui n’est guère vraisemblable : cet excès de respect dans de pareilles circonstances serait devenu un excès d’injure. Ce monarque humilié s’applaudit du retour apparent de sa grandeur avec des transports si vifs, qu’il ne cessait pas d’embrasser Cortez et de lui exprimer sa joie. Tandis qu’il s’y livrait sans mesure, le général espagnol, par un autre trait de cette politique qu’il savait transformer en générosité, donna ordre en sa présence qu’on levât toutes les gardes, et lui dit que, la cause de sa détention ayant cessé, il était libre de se retirer dans son palais. Mais il savait que cette offre ne serait point acceptée. On avait entendu dire à Montézuma, que, jusqu’au départ des Espagnols, il n’était pas de sa dignité de se séparer d’eux, parce qu’il perdrait l’estime de ses sujets, s’ils pouvaient s’imaginer qu’il tînt sa liberté d’une main étrangère. C’était Marina qui lui avait inspiré ce sentiment par l’ordre même de Cortez, qui n’avait pas cessé d’employer l’adresse pour le retenir dans sa prison. Cependant, quoique ce motif conservât sur lui toute sa force, il eut