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montagnes une vie pauvre et laborieuse, uniquement jaloux de leur liberté ; mais que, l’expérience leur ayant fait connaître la valeur des Espagnols, ils ne voulaient pas tenter plus long-temps la fortune, et qu’ils leur demandaient seulement en grâce d’épargner leurs dieux, leurs femmes et leurs enfans.

Cortez, porté naturellement à estimer la grandeur d’âme, fut touché de la noblesse de ce discours, et de l’air libre et guerrier de Xicotencatl, et il lui témoigna d’abord tout le cas qu’il faisait de lui. Ensuite, reprenant un air sévère, il lui fit des reproches fort vifs de l’obstination avec laquelle il avait entrepris de résister à ses armes ; il exagéra la grandeur du crime pour faire valoir le mérite du pardon ; et, promettant enfin la paix sans aucune réserve, il ajouta que, lorsqu’il jugerait à propos d’aller à Tlascala, il en donnerait avis aux sénateurs. Ce retardement parut affliger Xicotencatl, qui le regarda comme un reste de défiance, ou comme un prétexte pour mettre la bonne foi des Tlascalans à l’épreuve. Il se hâta de répondre que lui, qui était le général, et la principale noblesse de la nation dont il était accompagné, s’offraient à demeurer prisonniers entre les mains des Espagnols pendant tout le temps qu’il voudrait passer dans la ville. Cortez, quoique fort satisfait de cette offre, affecta de la rejeter par une générosité supérieure. Il fit dire au général que les Espagnols n’avaient pas plus besoin d’otages pour