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connaissances humaines, et de lui renvoyer la plus grande partie de ses espions pour lui déclarer de sa part que les Espagnols craignaient aussi peu la ruse et la trahison que la force des armes ; qu’ils l’attendaient sans crainte, et qu’ils avaient laissé la vie à la plupart de ses gens, afin que leurs observations ne fussent pas perdues pour lui ; mais en même temps, pour répandre la terreur dans l’armée ennemie, il fit mutiler diversement les malheureux qu’il renvoyait. Ce spectacle sanglant causa tant d’horreur aux troupes qui marchaient déjà pour l’attaque, qu’elles parurent balancer sur l’obéissance qu’elles devaient à leur chef Xicotencatl, frappé lui-même de voir son projet éventé, se figura que les étrangers n’avaient pu connaître ses espions, et pénétrer jusqu’au fond de leurs pensées sans avoir quelque chose de divin. Il était dans cette agitation lorsque deux ministres, envoyés par le sénat, qui avait été choqué de l’insolence de sa réponse, vinrent lui ôter le commandement ; et ses troupes, peu disposées à le soutenir dans sa désobéissance, ne tardèrent point à se dissiper. Il rentra néanmoins dans Tlascala, sous la protection de ses parens et de ses amis, qui le présentèrent aux sénateurs, avec lesquels ils firent sa paix.

Les Espagnols avaient passé la nuit sous les armes et dans une vive inquiétude. Le jour suivant ne fut pas plus tranquille ; et quoiqu’ils apprissent de ceux qui leur apportaient des