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trop, dans la crainte de quelques ruses, qui pouvaient les exposer au danger d’être enveloppés.

Cette étrange révolution passa d’abord aux yeux des Espagnols pour un miracle du ciel en faveur des armes chrétiennes : mais on sut bientôt que Xicotencatl, jeune homme fort emporté, avait outragé un des caciques auxiliaires, parce qu’il avait différé d’obéir à ses ordres, et que le cacique s’était ressenti de ses injures jusqu’à lui proposer un combat singulier. Tous les alliés de la république s’étaient soulevés à cette occasion ; ils avaient résolu brusquement de quitter une armée où l’on marquait si peu de reconnaissance pour leur zèle et leur valeur. Ce dessein s’était exécuté avec une précipitation qui avait jeté le désordre dans les autres troupes, et Xicotencatl, troublé par un incident si funeste, avait pris le parti d’abandonner la victoire et le champ de bataille aux Espagnols.

Malgré tant de marques d’un bonheur privilégié, le péril dont ils se voyaient délivrés, mais qui pouvait se renouveler à tout moment, les jeta dans une vive inquiétude qui produisit de nouveaux murmures. Cortez retomba dans la nécessité d’employer son éloquence et son adresse pour les apaiser ; il ordonna une assemblée générale sous prétexte de délibérer en commun sur une situation dont il reconnaissait le danger : il avait recommandé à ses confidens de placer sans affectation les plus