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c’est-à-dire jusqu’à ce qu’ils furent rassurés par la puanteur, qui commençait à s’exhaler du corps. Brayau, qu’ils informèrent aussitôt de leur découverte, ne voulut s’en rapporter qu’à ses yeux. Il fit son rapport aux autres caciques ; et, se désabusant tous ensemble de la prétendue immortalité de leurs tyrans, ils prirent la résolution de s’en défaire à quelque prix que ce fut. Leur entreprise fut conduite avec beaucoup de secret ; et les Castillans étant sans défiance, ils en massacrèrent une centaine avant que les autres eussent ouvert les yeux sur le danger. Un officier, nommé Sotomayor, fut enveloppé dans ce nombre. Il avait eu, dans son département, le frère d’Agueynaba ; et, quoique averti par la sœur de ce cacique dont il était aimé, il négligea ses avis et ceux d’un Castillan qui savait assez la langue pour avoir compris que les Américains chantaient déjà sa mort avant qu’il fût assassiné.

Ponce, alarmé pour lui-même, rassembla aussitôt tout ce qui restait de Castillans dans l’île ; et pressant les Américains dans leurs retraites, malgré l’arrivée des Caraïbes qu’ils appelèrent à leur secours, il en tira une vengeance qui leur ôta pour jamais l’espérance de rentrer en liberté. Tous ses gens étaient d’anciens soldats exercés à combattre les sauvages dans les guerres d’Espagnola ; mais aucun d’eux ne contribua plus à la victoire qu’un grand chien dont l’histoire fait un éloge singulier, et dont le nom mérite bien de figurer parmi