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tans, qui devaient être sacrifiés. Cortez, indigné de cette audace, fit appeler aussitôt les caciques, et recommanda qu’ils fussent amenés sans bruit : il feignit d’avoir pénétré leurs pensées par une supériorité de lumières ; et, louant le ressentiment qu’il leur supposait d’une violence qu’ils n’avaient pas méritée, il leur dit qu’il n’était plus temps de souffrir un abominable tribut de sang humain ; qu’un ordre si cruel ne serait pas exécuté devant ses yeux ; qu’il voulait au contraire que ses infâmes ministres fussent chargés de chaînes, et qu’il prenait la défense de cette action sur lui-même. Les caciques furent embarrassés : l’habitude de l’esclavage leur avait abattu le cœur et l’esprit ; cependant Cortez ayant répété sa déclaration d’un air d’autorité, auquel ils n’osèrent résister, les officiers de Montézuma furent enlevés à la vue de tout le monde, et on applaudit à cette exécution ; cependant il en fit mettre deux en liberté pendant la nuit, et les renvoya à Montézuma, qu’il était bien aise d’intimider, mais avec qui il ne voulait rompre qu’à l’extrémité.

La douceur affectée des Castillans, et le zèle qu’ils avaient fait éclater pour leurs alliés, s’étant bientôt répandus dans les cantons voisins, plusieurs autres caciques, informés par ceux de Zampoala et de Quiabizlan du bonheur dont ils jouissaient sous la protection d’une nation invincible, qui pénétrait jusqu’à leurs plus secrètes pensées, et qui semblait défier toutes les forces de l’empire du Mexique, s’assemblèrent