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furent placés sans embarras, et trouvèrent abondamment tout ce qui était nécessaire à leurs besoins. Le jour suivant, la visite du cacique fut annoncée par un présent dont la valeur montait à deux mille marcs d’or. Il le suivit de près, sur une espèce de brancard, porté par ses principaux officiers. Cortez, accompagné de tous les siens, alla fort loin au-devant de lui, et le conduisit dans son appartement, où il ne retint que ses interprètes, pour donner à cette première conférence l’air important du secret. Après l’exorde ordinaire sur la grandeur de son roi et sur les erreurs de l’idolâtrie, il ajouta fort habilement qu’une des principales vues des soldats espagnols était de détruire l’injustice, de réprimer la violence, et d’embrasser le parti de la justice et de la raison. C’était ouvrir la carrière au cacique pour apprendre de lui-même ce qu’on pouvait espérer de ses dispositions. En effet, le changement qui parut sur son visage fit connaître au général qu’il l’avait touché par l’endroit sensible. Quelques soupirs servirent de prélude à sa réponse. Enfin, la douleur paraissant l’emporter, il confessa que tous les caciques gémissaient dans un esclavage honteux, sous le poids de la tyrannie et des cruautés de Montézuma, sans avoir la force de le secouer, ni même assez de lumières pour en imaginer les moyens ; que ce cruel maître se faisait adorer de ses vassaux comme un des dieux du pays, et qu’il voulait que ses injus-